Organisation
Derrière son regard posé et son discours structuré, Christophe MACHU nourrit une conviction profonde. Selon lui, le monde du travail ne pourra se transformer sans remettre la coopération au cœur des organisations. Une conviction forgée sur le terrain industriel, enrichie par l’international, et aujourd’hui incarnée pleinement au sein de COOPREX International.
Une autre manière de travailler
Formé à Sup de Co Lille (SKEMA), Christophe débute sa carrière dans la vente de produits industriels pour de grands groupes français et européens. Très vite, il évolue dans des environnements complexes, où la performance repose autant sur la technique que sur la capacité des équipes à travailler ensemble. Son séjour de trois ans en Allemagne va s’avérer déterminant.
“Là-bas, j’ai découvert un autre rapport au travail. Plus discipliné, plus structuré, mais aussi plus collectif. Les décisions sont prises, puis assumées. On ne revient pas en permanence dessus.”
Il y découvre un système scolaire qui a fait le choix d’une organisation plus ouverte avec un rythme qui diffère de celui de nos écoles françaises. Plus souple et plus à l’écoute des élèves. Cette approche du collectif marquera durablement sa vision du management et de la coopération.
Voir le système dans son ensemble
Après près de dix ans dans la vente, Christophe évolue vers des fonctions de supply chain. Il travaille sur la synchronisation logistique entre les usines et les clients, sur les flux internes et externes, ainsi que sur des master plans industriels impliquant plusieurs sites. Cette vision globale du système lui permet de toucher du doigt une réalité souvent invisible. Les dysfonctionnements ne viennent pas uniquement des process, mais très souvent des relations entre les services. Commerciaux, logistique, maintenance, cadres, non-cadres, siège et usine…

“Bien souvent, les services ne se parlent même plus. Sauf que la non-coopération coûte cher, humainement et économiquement.”
L’épreuve de l’effondrement
Chez Continental, Christophe vit la fermeture d’un site. Une expérience marquante, presque fondatrice.
“Quand tout s’effondre, on apprend énormément. Mais encore faut-il accepter d’en tirer des leçons.”
Cet épisode agit sur lui comme un catalyseur. Il comprend qu’il ne veut plus se rendre dépendant de décisions venues de l’extérieur, en prise sur le collectif. Cette perte de sens est très largement partagée autour de lui. Un changement de voie s’impose.

Cooprex ou la coopération comme réponse
En 2012, Cooprex voit le jour. Christophe change radicalement de métier et découvre d’autres univers professionnels, d’autres cultures, d’autres façons de travailler.
Lors de notre entretien, celui-ci nous partage l’allégorie des tailleurs de pierre.
“L’un dira “je taille une pierre”, l’autre “je construis un mur”, et le troisième “je bâtis une cathédrale”. Le travail est le même, mais le sens change tout.”
On ne peut faire plus explicite, merci Christophe. Cooprex s’inscrit alors dans une réflexion plus large sur la raison d’être des organisations, nourrie notamment par les événements de 2009 et par la volonté de construire des collectifs plus robustes.
La rencontre décisive avec Gilles Le Cardinal
Pour aller plus loin, Christophe reprend ses études à l’EDHEC. Il veut se muscler, assumer ses choix, structurer son projet entrepreneurial. C’est à ce moment-là qu’intervient la rencontre avec Gilles Le Cardinal, professeur à l’UTC, qui travaille depuis plus de 30 ans dans le domaine de la coopération. Au sein du laboratoire Technologie et Sciences de l’Homme, entouré d’une équipe de chercheurs et de professionnels, il a trouvé et mis au point la méthode PAT-Miroir(c).
Une méthode de gestion des interdépendances et des conflits pour la relance de la coopération dans les organisations confrontées à des changements complexes et anxiogènes.

“C’était la rencontre improbable entre un professeur d’Université, chercheur reconnu et un dirigeant d’entreprise », nous dit-il en souriant.
De cette coopération naît la société COOPREX en 2012 : COOpérer dans les PRojets ComplEXes.
Remettre l’humain au cœur des risques
Christophe insiste sur un point fondamental. Les organisations se focalisent trop souvent sur les réponses techniques et passent totalement à côté des signaux humains. Celui-ci refuse les réponses simplistes et cite souvent le crash d’un avion causé par un pilote en détresse psychologique.
“On a parlé d’erreur humaine et on a refermé le dossier. Mais on ne s’est jamais demandé pourquoi personne ne s’était alerté de son état émotionnel. Je me refuse à croire que la coopération est sans importance. Chez Cooprex, nous avons préféré une approche préventive plutôt que palliative. Lors d’interventions, notamment sur des sites SEVESO, notre méthode PAT-Miroir © permet de faire émerger des peurs, des ressentis, des alertes invisibles dans les audits classiques.”
“En 20 ans, c’est la première fois qu’on me demande mon avis, sérieusement”.
Voilà ce que nous a confié un salarié.

Une vision profondément incarnée
Christophe est aussi un homme de famille, père de cinq enfants et grand-père attentif, pour qui la coopération se vit au quotidien. Sport, culture, musique, engagement spirituel, écologie… tout fait sens. Il vient souvent au travail à vélo, court en famille, joue de la guitare, se ressource en forêt de Compiègne.
“Cooprex a un potentiel immense ! Les souffrances au travail sont réelles, reconnues aujourd’hui jusque par certains médecins du travail qui recommandent PAT-Miroir© . La coopération n’est pas un concept naïf. Le monde peut changer par la coopération. J’y crois dur comme fer.”
Cooprex porte une ambition forte. Celle de redonner aux collectifs la capacité de se parler, de se comprendre et d’agir ensemble. Dans un monde du travail souvent fragmenté, il rappelle que les émotions sont des indicateurs puissants. Il nous faut les écouter et composer avec elles. Merci Christophe.